Chapitre 2

 

Le transport était ma spécialité dans l’au-delà – en cherchant à aider Savannah, j’avais passé pas mal de temps à localiser des trajets. J’étais moins douée dans d’autres domaines d’activité spectrale, même si j’avais jugé superflu que les Parques me fassent passer trois fois cette saleté de formation.

Le monde de l’au-delà dans lequel je vivais était une version de la terre, avec quelques sous-dimensions bizarres qu’on s’efforçait au maximum d’éviter. Tous ses occupants étaient d’origine surnaturelle, mais toutes les créatures surnaturelles ne se trouvaient pas ici. Quand j’étais morte, ma première pensée en me réveillant avait été : « Génial, maintenant je vais savoir ce qu’il y a de l’autre côté. » En fait, ça avait été ma deuxième pensée après : « Hmmm, j’aurais cru qu’il y faisait plus chaud. » Oui, j’avais échappé aux flammes infernales que ma mère et beaucoup d’autres m’avaient prédites, mais en mourant, je n’avais pas découvert ce qu’il y avait de l’autre côté, simplement ce que l’au-delà me réservait, à moi. Y avait-il ailleurs du soufre et des flammes ? Des auréoles et des harpes célestes ? Je l’ignore. Je sais seulement que je me trouve dans un endroit plus agréable que je m’y attendais, alors je ne vais pas m’en plaindre.

Je déposai Kristof sur les marches du tribunal. Oui, nous avons des tribunaux. Les Parques s’occupent de toutes les questions importantes de discipline, mais elles nous laissent gérer les conflits entre fantômes. D’où les tribunaux, où travaillait Kristof. Pas qu’il ait pratiqué le droit de son vivant cela dit. Le jour où il avait passé l’examen du barreau, il avait rejoint les affaires familiales. Mais voilà qu’il jouait désormais les avocats dans l’au-delà. Kris lui-même admettait que ce n’était pas le métier qu’il aurait choisi en priorité, mais il se retrouvait coincé là tant qu’on n’aurait pas ouvert de franchise de la Ligue nationale de hockey dans le monde des esprits.

En parlant de métiers… Kristof avait raison. J’avais besoin d’une pause. Je le savais depuis un bon moment déjà, mais je ne pouvais me résoudre à l’admettre. Je savais que le « boulot temporaire » de Kris ne serait pas du genre qu’approuveraient les Parques, mais ça me motivait bien plus que ça ne me décourageait.

Cette pensée m’avait à peine quitté l’esprit qu’une brume bleuâtre tombait pour s’enrouler autour de ma jambe.

— Hé, j’étais seulement…

Le brouillard m’aspira dans le sol.

 

Les Traqueurs me déposèrent dans la salle du trône des Parques, caverne de marbre blanc aux murs ornés de mosaïques en mouvement. Les Parques sont les gardiennes des strates surnaturelles du monde des esprits et, s’il leur arrive de nous appeler, c’est généralement qu’on a fait du grabuge. Je rassemblai donc mon courage quand le sol se mit à pivoter. Comme il ne le faisait pas assez vite à mon goût, je me retournai face aux Parques. Une jolie fillette était en train d’installer du fil sur un rouet. Elle ne paraissait pas avoir plus de cinq ou six ans et possédait des yeux d’un violet vif assorti à sa robe.

— Bon, dis-je. Qu’est-ce que j’ai fait ?

La fillette sourit.

— La question n’est-elle pas plutôt : « Qu’est-ce que j’ai encore fait » ?

Je soupirai et, en moins de temps qu’il n’en faut pour cligner des yeux, la fillette se transforma en une version quinquagénaire d’elle-même, avec de longs cheveux sombres et grisonnants et une peau café au lait trahissant les premières rides et la rudesse liées à l’âge.

— Eve, nous avons un problème.

— Écoutez, j’ai promis que je n’abuserais pas des codes de voyage non autorisés. Je n’ai jamais dit…

— Il ne s’agit pas de codes de voyage.

Je réfléchis un instant.

— La visite que j’ai rendue à Adena Milan pour échanger des sorts ? Hé, je me suis trompée en toute bonne foi. Personne ne m’avait prévenue qu’elle était sur liste noire.

La deuxième Parque secoua la tête.

— Bien qu’il soit fort distrayant de vous faire réciter la liste de vos infractions, je crains que nous n’ayons guère le temps. Il y a dix-huit mois, vous avez conclu un pacte avec nous. Si nous ramenions Paige et Lucas dans le monde des vivants, vous nous devriez une faveur.

— Ah oui… ça.

Merde. Comme elles n’en reparlaient plus, je croyais qu’elles avaient oublié. À d’autres. Les Parques se rappellent ce que Noé a pris au petit déjeuner le matin du Déluge.

Mon premier réflexe consista à m’en tirer par la ruse. De toute façon, qu’est-ce qui pouvait arriver de pire ? Eh bien, pour commencer, elles pouvaient annuler leur partie du marché et ramener Paige et Lucas dans le monde des esprits. Donc, pas question de ruser. Et puis j’avais vraiment besoin d’une distraction. Ça me paraissait un peu gros, comme coïncidence.

— C’est Kristof qui vous a mis ça dans la tête ? De me trouver de quoi m’occuper ?

La Parque céda la place à sa sœur aînée, une vieillarde au dos voûté dont le visage flétri était figé sur une grimace.

— Kristof Nast ne nous met absolument rien dans la tête, comme vous dites.

— Je ne voulais pas…

— Pas plus que nous ne rendons service à des gens comme lui. Nous pensions que cet emploi d’avocat l’occuperait. (Elle ricana.) Et c’est le cas. Ça l’occupe à chercher les ennuis.

— Si vous parlez de l’affaire de l’Agito, ce n’était pas la faute de Kris. Comme le plaignant s’est mis à mentir, il a bien fallu qu’il agisse. Ce n’était pas vraiment une falsification de témoignage.

— Rien qu’un moyen de parvenir à ses fins, dit-elle en me fusillant toujours du regard. C’est comme ça que vous pensez, tous les deux. Peu importe la façon dont vous y parvenez, tant que c’est le cas.

La sœur du milieu la remplaça.

— Une philosophie intéressante. Nous ne la partageons pas, mais dans certains cas… elle se révèle utile. Ce travail que nous souhaitons vous confier nécessitera peut-être certains de vos talents uniques.

Je dressai l’oreille.

— Ah bon ?

— Nous avons un esprit qui s’est échappé des royaumes inférieurs. Nous avons besoin que vous nous le rameniez.

Les royaumes inférieurs sont l’endroit où l’on retient les fantômes qu’on ne peut laisser se mêler à nous autres – les criminels vraiment atroces. Hmmm, intéressant.

— Alors de qui…

— D’abord, vous devez faire quelques recherches. (La deuxième Parque tendit la main dans le vide et en tira une feuille de papier.) Voici une liste de livres…

— Des livres ? Écoutez, vous devez avoir hâte que je finisse ce boulot, alors pourquoi ne pas zapper cette partie-là ? Je suis plutôt une fille de terrain.

L’enfant apparut, un sourire espiègle aux lèvres.

— Ah oui ? Eh bien dans ce cas, choisissons une approche plus pratique.

Elle agita la main, dont jaillit une boule de lumière aveuglante.

— Qu’est-ce que…, commençai-je.

— Chhhhhht.

La lumière retomba en une gerbe d’étincelles. Je clignai des yeux mais ne vis ensuite que les ténèbres. J’entendais toujours chuchoter cette même voix, long souffle étiré et monocorde dont je finis par comprendre qu’il ne s’agissait pas d’une voix, mais de l’air frôlant mes oreilles.

Je plissai les yeux et secouai la tête, souhaitant de toutes mes forces que ma vision de nuit prenne effet. Comme tous mes dons visuels, je possédais celui-ci à pleine puissance, car je l’avais hérité de mon père le Seigneur Démon Balam, Maître de la Vision.

Un vent cinglant fit claquer mes vêtements. Quelque chose me chatouilla les doigts. Je le saisis et, quand je tirai dessus, le mince fil se dégagea. Je le portai à mon nez. De l’herbe.

Ma vue commença à se préciser. La première chose que j’aperçus fut des vagues, qui montaient vers le rivage puis descendaient selon une cadence régulière. Mais je ne sentis pas l’odeur de l’eau. Pas plus que je ne sentis d’embruns sur ma peau ni leur poids dans l’air. Le vent était sec et sentait… l’herbe. Je clignai de nouveau des yeux et vis des vagues d’herbe, qui montaient et descendaient sur un terrain vallonné, s’inclinant sous le vent. Un océan d’herbe.

Autrefois, ça m’aurait surprise, mais après trois années passées à voyager dans le monde des esprits, j’avais vu des paysages des plus étranges. Dans les zones non occupées, les plaines sont assez fréquentes, vastes étendues vides de pierre, de sable ou d’herbe. Une fois, j’avais même atterri dans une plaine de lave. Pas très agréable… surtout quand j’avais compris qu’elle était moins vide qu’il y paraissait. À ce souvenir, je balayai du regard l’herbe haute. Elle ne donnait pas l’impression d’être occupée, mais sait-on jamais.

Je levai les yeux. Le ciel. Un ciel nocturne et couvert.

— D’accord, lançai-je aux Parques. Pas la peine de me coller. Je vais faire mes devoirs.

Un rire haut perché me répondit. Je n’aurais pas été surprise que leur petit tour fasse glousser la fillette Parque, mais ce rire paraissait trop vieux pour elle et aucune de ses sœurs n’était du genre hilare.

Comme personne ne répondait, je me dirigeai vers la source du rire. S’il y avait quelqu’un d’autre dans ce désert fantomatique, ce n’était sans doute pas quelqu’un que j’aurais envie de rencontrer, mais un peu de danger mettrait au moins de l’animation.

Le vent se mit à geindre, traversant ma mince chemise. J’envisageai de faire apparaître une veste mais me ravisai. Dans le monde des esprits, on pouvait passer des semaines, des mois, voire des années sans jamais éprouver de température qui aille au-delà de l’agréable tiédeur ou de l’agréable fraîcheur. Une fois de temps en temps, un peu d’inconfort ne faisait pas de mal.

Je m’avançai vers une côte abrupte qui me protégea du vent. Je me frottai les oreilles. À mesure qu’elles dégelaient, mon audition s’améliorait. Pas qu’il y ait grand-chose à entendre au-delà du vent. Non, attendez. J’inclinai la tête pour écouter. Un choc sourd, puis un chuintement. Silence. Choc, chuintement. Silence. Choc, chuintement.

Je préparai un sort provoquant une décharge électrique.

Ce choc sourd pouvait être un bruit de pas lents. Mais le sifflement ? Je n’avais pas vraiment envie d’y réfléchir. Le choc suivant s’accompagna d’un crissement évoquant des ongles sur un tableau. Puis d’un juron à mi-voix. Un échange de mots entre une voix masculine et une féminine. Un grognement. Un bruit sourd. Puis ça recommença. Choc, chuintement. Choc, chuintement.

Je lançai un sort brouilleur – s’il fonctionnait dans cette dimension, il devrait suffisamment déformer ma silhouette pour me permettre de passer inaperçue de toute personne qui ne me cherchait pas. Puis je grimpai jusqu’au sommet du tertre. À moins de six mètres devant moi se tenait une jeune femme munie d’une lampe torche. Je m’empressai de redescendre la colline, puis affinai ma vue.

Je regardai par-dessus la colline. La femme braquait sa torche sur un homme en train de creuser un trou. C’était ça, le bruit : le choc de la pelle s’enfonçant dans la terre et le chuintement de la terre qu’il rejetait sur le côté.

Tous deux avaient une vingtaine d’années. L’homme était petit et maigre avec une tignasse graisseuse. La femme était blonde, avec les cheveux relevés très haut en une atroce coiffure démodée. Ses habits ne l’étaient pas moins : minijupe, bottes montantes, manteau court. Ce qui n’avait rien de surprenant. Dans le monde des esprits, on s’habituait aux défilés de mode historiques. La plupart des fantômes s’en tiennent au style qu’ils aimaient de leur vivant. Enfin, à moins qu’il soit question de corsets ou autres instruments de torture similaires.

Nous avions ici deux fantômes des années soixante environ… ou soixante-dix. Comme il s’agissait de mes « jeunes années », ces deux décennies se mélangeaient dans une succession floue de minijupes, de tee-shirts tye-dye, de bottes gogo et de vêtements style disco.

— C’est assez profond ? demanda l’homme en se frottant les mains. Ça caille cette nuit.

La femme se pencha pour regarder à l’intérieur du trou puis hocha la tête. Elle posa la lampe à terre et le couple s’avança dans la pénombre. Ils revinrent chargés d’un long ballot enveloppé.

— Ce n’est pas assez grand, dit la femme. Il est plus grand que je le croyais.

L’homme hocha la tête, souleva sa pelle et se remit à creuser. Tout en le regardant, la femme s’entoura de ses deux bras en frissonnant. Compte tenu du froid et de la tâche qui les attendait, un frisson n’avait rien de déplacé. Mais son expression l’était : yeux brillants, langue pointant entre ses dents.

— C’était bon, dit-elle. Mieux cette fois. La prochaine fois, on ne devrait pas attendre si longtemps.

— Il faut qu’on soit prudents, répondit l’homme sans lever les yeux.

— Pourquoi ? Personne ne peut nous attraper. On est invincibles. C’est ça… (Elle frissonna de nouveau et désigna le corps.) C’est ça qui nous rend invincibles. Et différents.

L’homme la regarda avec un petit sourire. Il hocha la tête, puis tendit la main hors du trou et saisit le corps enveloppé. Tandis qu’il l’attirait vers lui, l’autre extrémité flotta au vent. Les yeux morts d’un jeune garçon fixèrent le ciel nocturne.

La scène se désintégra dans les ténèbres.

 

J’avais déjà vu des cadavres. J’avais moi-même envoyé pas mal de gens dans le monde des esprits. Quand on trafique avec des forces obscures, il faut accepter le risque d’être récompensé par un trépas anticipé. Mais j’entends par là mourir avant d’être vieux et d’avoir les cheveux gris. Le meurtre de toute personne trop jeune pour se défendre est le seul acte impardonnable en toutes circonstances.

Cette femme était-elle donc l’esprit meurtrier que les Parques voulaient que je trouve ? Aussitôt dit, aussitôt fait. La seule récompense que je demanderais serait d’être présente quand elles la renverraient dans sa dimension démoniaque. Les ténèbres s’éclaircirent et je levai les yeux en m’attendant à voir la salle du trône. Au lieu de quoi je me retrouvai devant une vitre couverte de givre. J’approchai les doigts. Elle était froide et glissante, mais mes doigts n’y laissèrent aucune trace. Quand je regardai à travers un coin dégagé, je vis la lumière du soleil miroiter à travers les chutes de neige. C’était étrange. Comme regarder des rayons de soleil à travers la pluie.

Un rire de femme me fit sursauter et mon esprit bondit en parallèle, pour retrouver la plaine herbeuse et le rire que j’y avais entendu la première fois.

— Oh, attends ! dit une femme. C’est le meilleur passage. Ralentis.

Je me détournai de la vitrine. De l’autre côté de la pièce, un jeune couple blotti sur le canapé regardait la télévision. L’homme tenait une télécommande à la main, dirigée vers le magnétoscope.

Il y avait des magnétoscopes dans les années soixante ? Non, un instant. Ce n’était pas le même homme. Donc, j’étais ailleurs. En étais-je bien sûre ? Mon regard s’attarda sur la jeune femme. Une blonde d’une vingtaine d’années au visage rond, plutôt jolie. La même femme. Vraiment ? Sa coiffure était toujours outrée, mais dans un style que je me rappelais du lycée. Et sa jupe était toujours mini mais, là encore, plus moderne. Je voulus zoomer sur son visage mais elle le tournait vers le téléviseur, ne me laissant la voir que de quart de profil.

— Voilà, on y arrive.

Elle se pencha vers le téléviseur. Ses yeux brillaient. Je sursautai de nouveau quand je reconnus l’expression d’extase que j’avais vue chez la femme qui se tenait au bord de la tombe.

— Allez, monte le son, dit-elle en frappant du poing le bras de son compagnon.

Il éclata de rire et s’exécuta. De mon emplacement, je ne voyais pas l’écran mais j’entendais la cassette. Les voix étaient déformées. Un film amateur.

Je lançai un sort brouilleur et m’approchai furtivement jusqu’à voir l’écran. Une chemise vert pâle le remplissait. Quelqu’un qui tournait le dos à la caméra. Typique. La chemise s’écarta. Un gros plan sur de la chair. Une jambe de femme nue. Ah oui. Un film amateur des plus typiques, du genre pour lequel on avait inventé les Caméscope. Je n’avais pas besoin de voir ça.

Je m’apprêtais à me détourner quand la caméra recula en me montrant la totalité du spectacle. Une jeune fille, pas plus âgée que Savannah, nue et attachée à un lit. Dont les draps étaient ensanglantés.

— Ah, c’est là. (La voix de la femme dans les aigus lorsqu’elle imita les sanglots de la jeune fille.) Je veux ma maman !

Je me jetai sur elle avec un rugissement. Mes mains se précipitèrent vers sa gorge, toutes griffes dehors. Je la heurtai, la traversai et basculai dans les ténèbres.

Femmes De L'autremonde, Tome 5
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